La maison de Bretagne – Marie Sizun

C’est décidé, Claire va vendre la maison du Finistère. Cette maison d’enfance où sa famille passait les étés. Des étés qu’elle préféreraient oublier, des liens qu’elle souhaiteraient briser. Sans enfants, sans compagnon, sa vie solitaire lui convient, et cette maison est le seul lien qu’il lui reste encore de sa drôle de famille. Elle quitte Paris et sous les frimas de l’automne arrive dans sa maison de Bretagne, sur l’île de Tudy, pressée de régler l’affaire en une semaine, pas plus. Mais rien ne se passe comme prévu. D’abord, les souvenirs remontent, pas de luttes possibles. Les paysages alentour, l’agencement des pièces, les meubles, et voilà les visages qui se dessinent : sa tendre mais désarmée grand-mère, sa mère froide et lointaine, sa sœur l’insaisissable Armelle dont elle est sans nouvelles, et son père adoré – le déserteur qui les a laissées toutes les trois tristes et seules. Puis l’incroyable découverte, sur le lit de son aïeule Berthe, d’un homme allongé, beau blond inconnu – ressemblant beaucoup à son propre père – inerte. Mort. S’il y aura bien une enquête policière, de suspense il n’y aura pas – dommage, d’ailleurs… la quête sera autre. Grâce à sa rencontre avec un jeune journaliste local, les souvenirs de Claire prendront chair et les zones d’ombre se dévoileront peu à peu. Un roman surannée à la douce langueur, un cheminement intérieur, des secrets de famille et la Bretagne belle et sauvage.

« Toute enfant, ce n’est pas que je n’aimais pas ma mère. Je ne la voyais pas. Je ne la situais que dans une sorte de brouillard. Un corps maternel auquel j’aurais appartenu sans le voir. Une utilité. Elle n’existait pas vraiment par elle-même, ne m’intéressait pas. C’est au sens propre que je ne la percevais pas, que je ne voyais pas sa personne. Je ne voyais que mon père, ne m’adressais qu’à lui ; de même que j’avais le sentiment qu’il n’aimait que moi. Quand il est parti, il a bien fallu que je la découvre, elle. J’ai pris soudain conscience de son physique, de ses traits réguliers mais insignifiants, de son corps sans chaleur, de sa voix plate. Et ce fut pour la détester. »

« On ne les voit guère quand on passe. Je ne peux m’empêcher de penser que c’est l’une de ces demeures, secrètes et lumineuses, que tu aurais aimé habiter, maman, plutôt que la nôtre, notre drôle de maison (…). Tu rêvais d’ailleurs. Et pourtant tu restais, et pourtant, toujours, tu revenais. Et c’est même ici que tu as été la dernière à vouloir passer l’été, quand nous avions, nous, abandonné. Alors, elle a raison, Yvonne : cette maison, cette drôle de maison, notre maison de Bretagne, il fallait bien que tu l’aimes? »

La maison de Bretagne, roman de Marie Sizun, éditions Arléa, janvier 2021 —

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