Cher Gabriel – Halfdan W. Freihow

Gabriel

Nommé grande cause nationale en France cette année, l’autisme peut enfin bénéficier d’un éclairage médiatique et surtout d’une sensibilisation à ce trouble, souvent méconnu, au plus grand nombre. Car beaucoup d’entre nous ignorent quels sont les troubles autistiques, leur origine, leurs manifestations, les différentes prises en charge. Les troubles affectent généralement l’autiste dans la communication verbale et/ou non verbale, dans l’interraction sociale et engendre des comportements stéréotypés et répétitifs. Pour plus d’informations, je vous invite à aller voir ces sites : http://www.autismegrandecause2012.fr/, et http://www.autisme-france.fr.

Gabriel, le fils d’Halfdan W. Freihow, est diagnostiqué autiste dans sa petite enfance. Ce livre, l’auteur voulait l’écrire depuis longtemps afin de partager son vécu et ses connaissances sur les troubles de celui-ci. C’est sous la forme d’une longue lettre adressée à ce fils tant aimé que paraît cet ouvrage. En son nom, il exprime donc son ressenti, ses impressions, son quotidien auprès de ce petit garçon différent.

On pénètre dans l’intimité du père et du fils dont l’existence est indéfectiblement liée. Gabriel va à l’école, part en vacances, a des amis, une famille qui l’entoure, joue aux pirates… comme n’importe quel enfant de son âge, seulement les relations avec les autres sont différentes, Gabriel a constamment besoin d’être rassuré et accompagné dans tous ses faits et gestes.

Avec pudeur, l’auteur évoque, sans pathos, la réalité au plus juste comme les difficultés éprouvées par son couple quand l’épuisement et l’impuissance surgissent. Ces moments-là sont inévitables mais le lien qui les unie au petit garçon est indestructible. L’abattement ne dure pas. Ils se doivent l’un et l’autre d’être là, toujours à ses côtés, le rassurer, ne pas lui mentir sur son avenir, l’aider à grandir, l’accompagner. La part de rêve n’est pourtant pas négligée dans la vie de Gabriel, elle lui est même nécessaire. Le père entre donc très volontiers dans les histoires de pirates et de trésors de son petit garçon.

Une gestion familiale complexe faite de coups durs et de jolis moments. Des parents qui apprennent à connaître le fonctionnement de leur enfant « pas comme les autres », qui pas à pas lui invente un mode de vie. Un témoignage bouleversant et un message d’amour d’un père à son fils. À l’image du paysage norvégien qui les entoure – le vent souffle sur les vagues qui se cassent contre les rochers – rien n’est acquis, rien n’est figé, tout est à faire et refaire chaque jour. Un éternel recommencement. Mais, Gabriel est en vie, il est dans dans la vie, il est différent mais n’est pas en dehors d’elle. Garder l’équilibre. Savoir s’adapter aux autres, à la vie telle qu’elle est, et vice versa.

« Nous avons besoin d’un mur pour nous adosser, toi et moi. Parfois, la caresse d’une main suffit, d’autres fois, il nous faut tout un échafaudage de perspicacité et de compréhension pour ne pas tomber, pour ne pas sombrer dans l’ignorance, le désarroi et l’angoisse. Nous sommes chacun le mur de l’autre, parfois tu es le mien, mais souvent, c’est à moi qu’il revient d’être le tien, car tu trébuches, et tu tombes facilement. Et alors, Gabriel, il m’arrive d’avoir peur, quand je n’ai rien à m’agripper, rien à quoi me cramponner, à part le vent, la lumière et l’océan, quand toi, tu bascules hors de ma portée. »

« Qu’est-ce que je peux te dire sur le chagrin ? Le chagrin est aussi grand que le ciel et l’univers, grand comme l’éternité, et d’elle nous en avons parlé, ni l’un ni l’autre nous ne la comprenons. Le chagrin est aussi grand que l’énigme que tu représentes pour tous les scientifiques du monde, seulement en étant toi. Grand comme l’impénétrable, grande comme cette toute petite graine que la vie a omis de semer en toi, ta différence, l’absence qui te suivra toujours et qui m’emplira de chagrin. »

« Nous perdons ce que nous devons perdre, Gabriel – parce que c’est le moment, parce qu’il est temps, parce que rien ne dure quand c’est fini. Ni les maisons, ni les amis, ni les gens, même les vieux arbres ne durent pas plus longtemps que prévu, au-delà de leur temps. Parfois, tu me manques déjà. »

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Cher Gabriel, récit autobiographique de Halfdan W. Freihow, Gaïa, Mars 2012 —

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