Filles uniques – Anne Loyer

Pékin, de nos jours. Xinxin, quinze ans, mène une vie plutôt heureuse au sein d’une famille aimante. Ses parents, grands-parents et elle, tous vivent sous le même toit. Fille unique, comme de nombreux jeunes gens de sa génération, elle porte en elle l’espoir immense des siens quant à sa réussite scolaire. Mais un événement a-priori anodin, un grain de sable dans l’engrenage bien huilé de son existence, va renverser tout sur son passage : la meilleure amie de Xinxin lui annonce l’arrivée prochaine d’un petit frère ou d’une petite sœur. L’amie est déconcertée voire démoralisée par cette nouvelle, et Xinxin elle, prend soudain conscience d’un vide, d’un manque, voire d’une souffrance d’être seule. Sans frère ni sœur à ses côtés. En évoquant ce sujet avec sa famille, la jeune fille perçoit un malaise un trouble de l’embarras. Perplexe et inquiète, elle décide de mener sa propre enquête et se met à suivre sa mère qui, régulièrement se rend à l’orphelinat… Ce qu’elle y découvrira la changera à jamais. Un enchevêtrement d’émotions va surgir en elle, au plus profond : stupeur, colère, tristesse, espérance. C’est à ce moment-là qu’elle fait la connaissance de Long, un garçon élevé « au noir » – dans l’illégalité. Car rappelons-le, en Chine, de 1979 à 2015, régnait la politique de l’enfant unique – planification des naissances pour contrôler la démographie du pays -. Une décision qui engendra douleurs déchirements et une grande détresse dans les maisonnée chinoises. Et des conséquences dramatiques ; enfants cachés, avortements clandestins, stérilisations… L’amour va cueillir les deux adolescents, et les rendre forts audacieux courageux pour faire remonter ensemble à la surface les choses du passé, les comprendre et tenter de les réparer. Retrouver la plume émouvante et pertinente d’Anne Loyer est un plaisir. Ce roman est haletant, surprenant. On ne peut qu’éprouver de l’empathie pour l’héroïne, faire sienne sa révolte. Et mieux comprendre à travers ce texte cette loi de l’enfant unique, la résistance de certaines traditions et l’ouverture, enfin, vers des libertés tellement attendues par tout un peuple.

« De m’abandonner parce que diminuée. Parce qu’en mauvaise santé. Elle m’a virée de sa vie et de son cœur vite fait bien fait parce qu’amoindrie. Une charge dont il fallait se délester. Un fardeau à oublier. Tu comprends maintenant pourquoi je cherche tant à éviter d’y penser? Les souvenirs si émouvants de mes parents se heurtent toujours à ce que je devine en arrière-plan. Il a bien fallu que des parents me jettent pour que les miens me sauvent. Mon existence ne tient que sur ce paradoxe insensé. Je suis passée d’une indifférence béante à un amour inconditionnel. Et je ne peux jamais penser le deuxième sans la première. Jamais l’un sans l’autre. Ils sont reliés de manière si étroite que j’ai parfois du mal à me livrer sans défense à l’affection éperdue de mes chers parents. Une affection qui s’est construite sur un désamour originel. »

Filles uniques, roman jeunesse d’Anne Loyer, dès 12 ans, éditions Slalom, février 2021 —

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